Une découverte étonnante et pour le moins, préoccupante, agite les scientifiques allemands et les employés des pompes funèbres : au moins 40 cimetières ont fermé leurs portes aux nouveaux arrivants après avoir découvert que les cadavres enterrés, pourtant vieux de 40 ans, ne se décomposaient plus. Comment expliquer un tel phénomène ?
Comment fonctionnent les cimetières ?
Lorsqu’un proche décède, il faut lui payer une concession dans un cimetière, un espace qui sera dédié à sa sépulture. En revanche, une concession n’est presque toujours que louée et finira donc par arriver à échéance. Le jour venu, les fossoyeurs ouvrent la tombe, rassemblent les restes décomposés pour qu’ils prennent moins de place et louent la sépulture à une nouvelle famille.
Habituellement, les concessions durent entre 30 et 60 ans, le temps pour la famille proche de ne pas subir le « déménagement » du mort et, surtout, le temps pour le cadavre de se décomposer. Seulement, depuis quelque temps, une quarantaine de cimetières allemands ont remarqué, lors de l’ouverture de certaines sépultures, que des cadavres vieux de trente à quarante ans n’étaient pas décomposés.
Le phénomène est si important que certains morts donnent l’impression d’avoir été enterrés il y a à peine une semaine. Résultat, les cimetières ne peuvent plus accueillir de nouveaux venus, faute de place. Ils ne peuvent évidemment pas se débarrasser d’un cadavre, mais ils ne peuvent pas non plus rassembler les restes pour gagner de la place quand il est en parfait état.
La pollution en cause
Face à ce phénomène préoccupant, les scientifiques ont évidemment avancé tout un tas d’hypothèses, des plus farfelues aux plus plausibles. Il avait, par exemple, été suggéré que les conservateurs ingurgités tout au long de leur existence par ces morts auraient permis à leurs cellules d’être mieux conservées. Une hypothèse invalidée par le fait que, de leur vivant, les corps en question n’aient pas bénéficié de cette conservation.
La préparation des corps lors de la thanatopraxie a également été mise en question, mais très vite innocentée du fait que les pratiques du métier ont toujours très bien marché et n’ont pas particulièrement changé.
Une hypothèse plus plausible est venue incriminer la pollution des sols et, notamment, l’utilisation de pesticides. Effectivement, l’utilisation massive de pesticides dans certaines régions du monde et d’Allemagne fait pénétrer ses produits profondément dans le sol. Résultat, les insectes et autres formes de vie n’y survivent plus et ne peuvent plus participer à la décomposition du corps.
Effectivement, n’oublions pas que sans insectes et autres petits animaux souterrains, le corps ne peut pas se décomposer de lui-même. Le cadavre doit être consommé par la terre et ses habitants pour disparaître. Dans le même genre, la trop grande humidité du sol (sans doute due à son érosion liée aux monocultures intensives) empêcherait également le développement d’une vie souterraine riche.
Les cercueils sont-ils de trop bonne qualité ?
Une autre hypothèse au sujet de cette décomposition des cadavres impossible concerne les cercueils et leur trop grande qualité. Assurément, des cercueils trop hermétiques empêchent les bactéries, les insectes et les vers d’atteindre le cadavre pour le consommer. En réalité, ils ne l’empêchent jamais définitivement, mais ralentissent beaucoup le phénomène.
Depuis plusieurs décennies, les pompes funèbres rivalisent d’ingéniosité et de savoir-faire pour produire et vendre des cercueils toujours plus luxueux dans des bois massifs d’excellente qualité, vernis pour résister au temps et hermétiques pour préserver le corps. Évidemment, les familles qui ont les moyens se tournent vers ces offres, heureuses d’offrir ce qu’il y a de mieux à leurs regrettés parents et, sans doute, soucieux de préserver un peu plus longtemps l’intégrité de son corps.
D’ailleurs, face à ce phénomène de décomposition des morts trop lente, certains scientifiques, accompagnés de certains membres des pompes funèbres, ont proposé de revenir à des cercueils en sapin, un bois qui se décompose beaucoup plus rapidement, et de limiter le plus possible la présence de métal et de métaux lourds dans la sépulture, des composants qui tuent de nombreuses bactéries.
Quelles solutions pour favoriser la décomposition des cadavres ?
De toute évidence, l’une des premières solutions serait de tout faire pour rendre le sol des cimetières à nouveau gorgé de vie. Pour cela, il faudrait interdire un grand nombre de pesticides et veiller à ce que le périmètre encadrant les cimetières soit totalement vierge de cultures. Une bonne solution, sans doute, mais difficilement applicable.
D’autres scientifiques ont proposé un nouveau genre de cercueils en béton qui a l’avantage de laisser circuler largement l’aire et, donc, de favoriser la décomposition et l’accès au cadavre pour les insectes et les vers. Cependant, cette solution est souvent mal perçue par les familles qui, au cœur du deuil, refusent de se « débarrasser » le plus rapidement possible du cadavre.
Au niveau administratif, certains Lands d’Allemagne ont choisi d’autoriser la mise en terre des cadavres sans cercueil, mais dans des sacs de toile ou de coton. La décomposition est alors beaucoup plus rapide. Il est même possible, dans certaines régions allemandes, de se faire enterrer à même la terre, en dehors d’un cimetière, avec un arbre pour seule pierre tombale.